23 févr. 2010


GEOGRAPHIE

LA MER D’EMBHÄRR

Située aux confins du détroit de Béring et de la Sibérie orientale, face à la mer des Tchouktches qu’elle domine, cette mer intérieure ce distingue par son altitude plus élevée que celle du niveau des océans et son absence d’eau liquide actuellement. Elle n’a été découverte que tardivement en 1875 par le Chevalier D’Embhärr, poète et aventurier argentin désargenté, alors qu’il cherchait à épater son collègue Livingstone. Capturés par les Tchouktches qui le prirent au départ pour un lapin de mer géant, il ne dut son salut qu’à son modeste talent de joueur de bandonéon qui subjugua cette peuplade hirsute et dépenaillée, ignorante des raffinements musicaux de l’occident triomphant. Fort de ce premier succès, il se mit à chanter et à jouer de plus en plus fort de l’instrument extensible, au point de provoquer une avalanche qui fit sauter les blocs de roches obstruant l’entrée de la cuvette ou reposait la mer, qui fila rejoindre bien naturellement l’océan, sous les yeux médusés du Chevalier et des autochtones. Un peu confus, D’Embhärr s’éclipsa discrètement en abandonnant son bandonéon.
On peut encore admirer de nos jours l’instrument, ainsi que la tête réduite du Chevalier, au Musée des Arts Approximatifs de Sibérie de Kiev.


Illustration : Le Chevalier D’Embhärr, portant le fameux chapeaumaphore de son invention, qui lui permettait d’envoyer des signaux de détresse sans attirer l’attention du public.

19 févr. 2010


POESIE


« Le dessous des signes » de Jean Chapoutin


« Le poète est celui qui s’écrie à jamais pour toujours » disait René Rougeard au cours la préface fameuse qu’il consigna jadis dans son Anthologie de la Poésie Rustique Cavernicole, et c’est vrai que Jean Chapoutin appartient à cette race de poète obscur et fécond dont l’œuvre serpente sans cesse entre les rives escarpées de la métaphysique rurale et les falaises abruptes le l’ésotérisme agricole.

Pour tout dire, l’ensemble des textes réunis dans ce recueil –pour la plupart inédits- est formé à première vue de blocs grammaticaux abscons et déroutants pour le non-initié.

Fort heureusement, si l’on a la sagesse et l’intuition de ne pas s’en tenir au sens trivial et littéral de la chose dite, mais plutôt à la mélodie, aux sons, il est facile alors de s’abandonner à l’émotion première de la phrase dans sa candeur initiale, au babil subtil d’un « je » dont le contour s’efface à mesure que grandit en nous la notion d’immanence, extase frôlée mais jamais déflorée, indicible ardeur à naître par et pour les mots qui nous accouchent et nous délivrent de notre aveuglement rationnel, cette ornière matérielle dans laquelle gît notre âme impuissante. C’est le but que s’est en tout cas fixé Chapoutin tout au long de sa vie d’ermite érudit, au cœur de la campagne Margouilloise et des ses frustres habitants.

Mais laissons s’élever la parole du poète :


LE PRE DES SONGES


J’ai trop aimé le vent,

La mer

Le ciel,

J’ai trop aimé traîner

Dans le tunnel des odeurs

Dans l’herbe,

La fleur.


J’ai trop aimé la vie,

L’amour,

Le vin,

J’ai trop aimé dormir

Et me voici devin

Dans le temple

De l’heure.


Qui

Pensera

M’oublier ?


Qui

Restera

Mobilier ?


Ô mon corps,

Je te donne cent baisers,

Puisse le sommeil

Venir t’emporter.


Ce petit sonnet est d’autant plus poignant qu’il semblait augurer de la fin tragique de Chapoutin. Ce dernier fut en effet dévoré par les fourmis alors qu’il faisait une sieste bien méritée sous un pommier. Prémonition ?

Seuls les poètes et les esprits élevés comme ceux de Chapoutin bénéficient de ces éclairs de lucidité prométhéenne et nul doute que ce petit ouvrage finement ciselé émerveillera les âmes pures nanties de longs trajets en métropolitain, et leur servira de passeport pour changer de quai, le cœur léger.


Illustration: Jean Chapoutin sur le point de s'endormir après avoir frôlé l'absolu. Gravure anonyme.

18 févr. 2010

INSOLITE


LE PLUS VIEUX PNEU DE l'HISTOIRE a été exhumé près de la frontière espagnole de San Francisco. L’extraordinaire usure de la gomme ferait remonter son âge à plus de 2000 ans. Les garagistes locaux crient au scandale et refusent de payer la facture pour malfaçon que leur tendent les héritiers légaux de Jésus-Christ et de Ponce Pilate. Les avocats de Marie-Madeleine se seraient aussi montrés intéressés histoire de « racler la caillasse qui reste » selon leur propre terme.

LA PIZZA LA PLUS GRANDE a été cuite au cours de l’été 1924 dans la propriété de Jean-Pierre Marshal, à Palenque(Mexique). D’un diamètre de 6m20, elle a été entièrement mangée par des fourmis géantes sous les yeux effarés de l’épouse de Jean-Pierre et de ses enfants, géants eux-aussi.

LES PLUS GRANDES JAMBES DU MONDE appartiennent à Eric Famous. Elles mesurent plus de 28 mètres de long (28,23m) et l’empêchent d’avoir un pantalon décent, et donc de sortir dans la rue pour s’acheter des glaces au sirop de porc tropical, ses préférées. Un moulage de son torse amaigri par les privations est visible au Centre Médical Mireille Mathieu (CMMM) de Cracovie.

L’HOMME LE PLUS GRIVOIS DE NORMANDIE a été interpellé lundi à son domicile de Caen, après une filature de plusieurs semaines. La police a retrouvé chez lui de vieux numéros de minitel-rose ainsi qu’un important stock de photos floues mettant en scène des animaux travestis ! L’homme est rapidement passé aux aveux et ses cheveux et ses ongles ont été confisqués pour être analysé à fond par l’équipe du professeur Pilar qui se trouvait là par hasard.

LES HOMMES PREHISTORIQUES pratiquaient déjà le tennis. Des balles et des raquettes fossiles ont effectivement été retrouvées dans une tombe datant de 30000 avant Roland-Garros. Des ossements d’arbitres portant de fines traces de morsures ont également été exhumés, ce qui laisse à penser que les règles du jeu étaient aussi complexes qu’aujourd’hui.

NOUS AVONS PENSÉ À TOUT



SEXUALITE


Philippon De la Tourbe nous écrit de Saint-Sourd l'Anguille :


De temps à autre, par désœuvrement, j’avoue faire l'amour avec une chaussure.

Attention, je ne suis pas un pervers et il n’y a rien de très excitant à tout cela si l’on n'y met pas un brin de passion. Je commence donc par lui faire la cour : une cour prudente et chaste au début, puis un peu plus appuyée. Je soupire, je lui jette des regards désespérés, c’est une cour explicite mais extrêmement courtoise, très dix-neuvième.

Elle, de son côté, fait mine de ne pas me remarquer. Elle affiche une indifférence hautaine en réponse à mes mots doux et me tourne résolument les talons chaque fois que j'essaie de l'aborder. Une vraie coquette. Je fais alors semblant d'abandonner, je froisse mes lettres enflammées et les jette à terre avant de faire celui qui part sans se retourner. Bien entendu, c'est le moment qu'elle choisit pour laisser pendre un lacet que je m'empresse de renouer, les doigts tremblants d'excitation. La glace est rompue et nous balbutions notre première conversation. Je l'invite à prendre un pot au café du coin. L'ambiance est très détendue ; nous rions, nous nous apercevons que nous avons pleins de choses en commun et regrettons de ne pas nous être rencontrés plus tôt. Je la raccompagne ensuite jusqu'à chez elle et là, elle m'invite à prendre un dernier verre, mais je refuse, je prétexte que je dois aider un cousin tétraplégique à apprendre le Sanskrit le lendemain et je la laisse seule, un peu décontenancée. Que voulez-vous, c'était trop facile, tout est allé trop vite. Je la rappelle le soir suivant pour lui dire que j'ai réfléchi, que ce n'est pas la peine qu'on se revoit, que je ne suis pas prêt à assumer une liaison durable et qu'il vaut mieux qu'elle m'oublie. Elle éclate ensuite en sanglot et me supplie de venir la rejoindre, sinon elle se jette du douzième étage. J'arrive chez elle in-extrémis et parviens à la faire renoncer à son projet fatal. Nous nous embrassons alors fougueusement sur le canapé tandis que mes mains fébriles caressent son cuir mordoré et que le crépuscule lance ses derniers feux sur les nuages incandescents qui roulent à l'horizon. Là d'accord, je veux bien lui faire l'amour en parfait gentleman car j'aurais vécu une passion intense et brûlante dans un cadre hautement romantique.
Comme je disais à ma femme l’autre jour : « Autant se branler dans une godasse, sinon. » Elle est parfaitement d’accord avec moi là-dessus, mais je sens qu’une gêne légère s’est installée entre nous. Ma passion pour certains souliers lui semble suspecte. Pourtant, je fais attention de ne choisir que des bottines en skaï ou des escarpins en croûte de porc, mais elle semble irritée, j’irai presque jusqu’à dire jalouse.

Comment lui faire comprendre que cette innocente manie n’altère en rien les sentiments que je lui porte ?


La réponse d’Oncle Paul :


Cher Philippon,

Votre passion pour la cordonnerie n’a rien de répréhensible tant qu’elle reste dans le cadre légal et juridique de l’adultère domestique de proximité. De grands hommes comme le Maréchal Flemme ou Henriette De gaule ont eu eux-aussi recours à ces expédients pour lutter contre l’usure naturelle du désir, avec le succès que l’on connaît.

Il nous apparaît cependant que votre penchant pour le romantisme risque de nuire à l’épanouissement de votre couple। Soyez donc moins ciel à ciel et renoncez aux préliminaires pour vous consacrer uniquement à la phase finale de votre entreprise en ayant soin de choisir des cuirs blancs et nacrés qui pourront faire passer votre semence pour du cirage. Votre épouse sera de la sorte réconfortée de voir avec quelle assiduité vous vous consacrez aux tâches domestiques et oubliera bien vite vos passades antérieures au profit de la pommade présente que vous aurez soin d’étaler avec ostentation sur ses brodequins, au point qu’elle risque fort de défaillir et de feindre l’abandon vénérien. Dans ce cas, faites-lui respirer les sels et profitez-en pour achever de lui changer ses chaussettes en soie, même si c’est plus compliqué à dire qu’à faire.


Illustration: description anatomique de la chaussure du futur par Léonard de Vinci. Comme beaucoup de ses inventions, elle ne connut qu'un succès mitigé.

17 févr. 2010


J’élève un enfant sauvage dans mon jardin.

Beaucoup de parents sont rebutés à l’idée d’élever un enfant sauvage. Pourtant, en prenant quelques précautions élémentaires, rien n’est plus gratifiant que de le voir jouer et gambader dans le parc de votre demeure. Il égayera notablement vos massifs de rhododendrons et sera une source inépuisable d’épuisement pour vos globes oculaires.

Voici quelques conseils pour réussir son acclimatation.

Où le trouver ?

On observe couramment les enfants sauvages en forêt, à condition de ne pas les faire fuir en leur lançant des pierres. L'enfant sauvage est particulièrement abondant dans les massifs montagneux peuplés d'essence de hêtre et de châtaignier. Son métabolisme robuste s'accommode sans peine des climats les plus rudes et on peut le trouver jusqu'à trois mille mètres d'altitude en train de faire de la luge.

On le capture à l’aide de friandises périmées ou de fausses barres de chocolats en plâtre. Parfaitement illettré, l'enfant sauvage ne saurait faire la différence avec le vrai chocolat et ne peut s’assurer de l’exactitude des dates de péremption. Sa capture est donc un jeu d’enfant.

De quoi se nourrit-il ?

On l’a vu, essentiellement de chocolat en tablette ou de biscuits riches en protéines hydrogénées et en huile de palme, mais aussi d’escargots et de petits insectes. Très utile au jardin, c’est l’auxiliaire rêvé pour lutter contre les doryphores et les charançons. Les vieux sujets préfèrent quand même les sucreries, il faut alors impérativement les chasser de la cuisine -sans violence inutile, mais sans céder à leurs caprices non plus.

Les plus jeunes se contentent d’un peu de télévision chaque matin.

La reproduction en captivité

Aux beaux jours, l’enfant sauvage grimpe aux arbres, puis grimpe sur sa moitié si vous avez eu la présence d’esprit d’en acclimater une quelque temps auparavant. Les bébés d’enfants sauvages sont roses et dodus mais ne parviennent que rarement à maturité car les enfants domestiques les confondent avec les baigneurs en plastique, et les noient dans leur bain sans le faire exprès. Il vaut donc mieux que les deux espèces ne cohabitent pas si vous voulez vous lancer dans l’élevage intensif.

Les soins quotidiens

L’enfant sauvage a développé un sérieux retard en matière de comportement vestimentaire, aggravé par une hygiène corporelle aléatoire. Inutile donc de s’embarrasser d’une encombrante garde-robe. Quelques frusques en coutil épais suffiront pour les saisons froides. Dès le printemps, l’enfant sauvage vaque nu comme un ver et sautille de ci de là au gré des fessées que vous lui prodiguez.

Il arrive qu’il tombe malade, mais c’est un simulateur né : Amusez-vous à le démasquer et à triompher de ses rougeoles imaginaires à l’aide d’un clystère de fort diamètre, vous verrez qu’il reprendra bientôt le chemin de l’école buissonnière que vous avez pris soin de fabriquer au fond du jardin.

En cas de fièvre persistante, l’usage du suppositoire au camphre s’avèrera souverain, ainsi que les saignées et les pointes de feu si vous vous sentez l’âme d’un Fagon.

La nuit, l’enfant sauvage dort dans un trou remplit de feuille morte. Pensez à changer régulièrement les feuilles. Achetez-en au besoin chez un Feuillard patenté si vous ne voulez pas les tuer vous-même.

L’enfant sauvage, mythe ou réalité ?

On rapporte que les vieux enfants sauvages, lorsqu’ils sentent la fin venir, se rendent en un lieu secret pour se laisser mourir de rire en se racontant des blagues éculées. C’est le fameux « Cimetière des vieux enfants » de la légendaire contrée de Carambar. La véracité de cette histoire est fortement mise en doute depuis la découverte d’ossements de clown qui tendent à prouver que ces enfants ont été poussés à rire contre leur gré. La polémique fait toujours débat au sein de l’Académie des Scientistes Troupiers.

On dit aussi que les enfants sauvages, au cours de la pleine lune, se transforment en enfants-garou. C’est parfaitement vrai et démontré dans l’ouvrage de Jean-Luc Poisson « Ruralité et cul-terrisme» dans lequel on apprend aussi que pour éloigner ces dangereux Néo lycanthropes, il suffit non pas de clouer-ce qui est cruel- mais de coller à la sécotine une chouette sur la porte de sa maison. Sinon, un suppositoire en argent massif fait aussi l’affaire.

Résumé :

Pour conclure, nous dirons que l'enfant sauvage a été une étape nécessaire à l'avènement de l'enfant actuel, tel que nous le connaissons. Notre devoir est de le protéger afin que nos chères têtes blondes puissent se rendre compte du chemin parcouru depuis l'aube de la maternelle et nous remercier des efforts que nous avons consenti pour qu’ils parviennent à leur tour à devenir de jeunes vieux capables de payer nos retraites. L’enfant sauvage est à l’humanité ce que le cheval est à la vapeur.



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ZOOLOGIE II


LE LAPIN DE MER




Le lapin de mer est un animal furtif, agile, joueur, voire taquin, vaguement enclin à la monogamie, et dont les oreilles ont disparu au cours de sa lente adaptation à la vie aquatique. 

Contrairement à ses cousins terrestres, le lapin de mer ne creuse pas de terriers car c’est un indécrottable paresseux. A force de se laisser ainsi mollement porter par les courants, sans forcer, ses membres se sont atrophiés. Il ressemble donc vaguement à un saucisson à queue, avec de longues dents. Comme il n’use plus ses incisives à ronger les végétaux, ces dernières ont poussé démesurément vers le bas, car c’est moins fatiguant. Sa nourriture se compose essentiellement de frites marines qu’il trouve au pied des moules, ce qui explique son embonpoint et son faible goût pour le sport en général. Cela ne l’empêche pas de savoir attendrir son entourage et c’est par dizaine que des femmes en villégiature sur la Côte d’Azur craquent en disant à leur mari : « Oh ! Regarde chéri comme il est trognon ! » et c’est par dizaine que des maris rétifs ramènent des lapins de mer à la maison.

Le lapin de mer n’est pas un intellectuel et ses performances au Scrabble avoisinent le zéro, mais sa domestication est aisée. Il peut distinguer plus d’une centaine de mots différents.

On peut également lui apprendre à chanter et à faire des claquettes, ainsi qu’à participer aux cérémonies religieuses. Certains sujets particulièrement doués réussissent même à faire du cinéma, avec un certain succès, mais leur cabotinage outrancier finit toujours par les faire échouer à deux doigts de l’Oscar du meilleur second rôle animal, catégorie rongeur de compagnie.

Dans la pratique, l’élevage du lapin de mer ne pose aucun problème. Une poignée de frites, quelques moules, une tape amicale sur la croupe et le lapin de mer 



devient votre ami pour toujours. Il ne vous quittera plus

 jamais, on vous aura prévenu. C’est un sentimental à l’affect surdéveloppé, un grand romantique, un cœur d’artichaut, une sale lopette.

A la belle saison pourtant, les grands mâles dominants ressentent l’appel de la terre. Ils font alors une cour sommaire et bruyante aux femelles, puis les lutinent sans grâce sur les plages torrides en poussant des grognements obscènes. Aussitôt après, ils s’endorment. Une fois réveillés, ils recommencent à besogner leurs compagnes et ce manège dure plusieurs semaines harassantes à l’issue desquelles les femelles donnent naissance à un œuf tout blanc d’où sortira un lapereau tout noir, à condition que les parents aient la patience de couver jusqu’à l’éclosion, ce qui est peu probable compte-tenu de leur légendaire je-m’en-foutisme et de l’énervement bien compréhensible des touristes avec qui ils partagent le littoral.

En raison de la médiocrité de sa chair, le lapin de mer est peu prisé des hommes-grenouilles qui ne voient en lui qu’un pis-aller. La femme de l’homme-grenouille - la grenouillette-, fait la moue lorsque son grand dadais de mari lui rapporte du lapin de mer à déjeuner ; cet animal a brisé bien des couples subaquatiques. Le Commandant Cousteau lui-même recommandait la plus grande prudence aux hommes de la Calypso au sujet de cet animal larvaire ; il est de toute façon admis que les lapins de mer passent pour porter malheur une fois à terre.

Pour finir, nous ajouterons que le lapin de mer n’est certes pas indispensable à la compréhension de l’océanographie dans ses grandes lignes, mais qu’il contribue à faire joli sur nos plages, ce qui est déjà beaucoup.



SANTÉ


L'ANKYLOSE DE CARRARE




La maladie dont nous allons parler aujourd’hui est peu commune, sans être rarissime non plus, mais elle est classée parmi ce qu’il est convenu d’appeler les maladies orphelines, à la différence de la peste par exemple dont on connaît bien les parents qui sont le choléra et la grippe.

L’ankylose de Carrare, puisque c’est d’elle qui s’agit, était autrefois appelée le « mal blanc » ou « syndrome de Michel-Ange ».

C’est une maladie qui s’attrape en faisant la sieste sous une statue de militaire. Des miasmes encore inconnus vous pénètrent durant votre sommeil et vous voilà contaminé. Au stade de l’incubation, la progression du mal est lente et passe inaperçue, mais petit à petit les extrémités de vos membres supérieurs blanchissent et deviennent friables comme un mauvais calcaire tandis que les articulations se durcissent et qu’il devient pénible de faire un mouvement, pénible et extrêmement risqué : on en connait qui se sont rompus les avant-bras pour avoir applaudi trop fort au théâtre ou à l’opéra. Il convient donc d’éviter les spectacles burlesques.

Au bout de quelques mois, vous êtes parfaitement fossilisé et il vous est devenu impossible de faire le moindre mouvement sans risquer de vous désagréger comme une vieille tranche de pain sec. C’est le premier stade, le plus douloureux.

Passé cette période peu agréable, votre famille vous met généralement dans le jardin car vous prenez trop de place dans le séjour, et si elle n’a pas de jardin, elle vous met à la cave, en tout cas dans un endroit frais et bien ventilé. C’est ce que les médecins appellent la période de latence. Elle peut prendre quelques semaines à plus d’un demi-siècle dans certains cas exceptionnels. Vous pouvez observer à loisir vos ongles de pied pousser.




Ensuite une rémission survient, assez brève, mais qui vous laisse le temps de souffler un peu et de rédiger votre testament si vous ne l’aviez pas encore fait. Cette courte période de ramollissement est poignante et constitue toujours un spectacle de choix pour les âmes sensibles en quête d’émotions rares car c’est aussi la dernière fois que l’on vous verra rire et danser la Lambada en string.

Le dernier stade est sans surprise: la fossilisation reprend de plus belle et vous mourez bêtement recroquevillé dans votre lit en essayant de faire un mot que la postérité retiendrait, mais vous n’arrivez pas à desserrer les mâchoires, alors vous faites « Arr ! » comme tout le monde et on vous enterre bien vite car votre agonie a mis les nerfs de votre famille à rude épreuve, il faut la comprendre.

Des cas de guérison spontanée sont bien observés ici et là, apportant un peu d’espoir à celui ou celle qui est atteint du mal mais, une fois rétablis, ces sujets restent nerveux et instables, peu enclins à la vie de famille, et finissent généralement par écrire leurs mémoires dans un style minéral qui n’engendrent qu’un ennui stérile chez leurs rares lecteurs.



CINÉMA


PETITS SECRETS EN CACHETTE AVEC SES AMIS




Un film de Louis Palmodiras


Ce premier film du jeune et talentueux Louis Palmodiras est attachant à plus d’un titre. 

On retrouve là tous les ingrédients qui ont fait le succès du cinéma d’auteur Français de ces dernières années : une intrigue amoureuse sur fond de prise de conscience collective de la nécessité d’être jeune, mais pas trop, libre, mais à condition de respecter l’autre dans sa différence inaliénable qui fait qu’il n’est pas pareil, et un zeste d’humour pour alléger le tout, vous obtenez une fable contemporaine décapante.

Le film est porté à bout de bras par une distribution éblouissante, la pétillante Karine Bréchet en tête -elle est également la compagne du réalisateur à la ville- qui campe là le personnage haut en couleur de Zora, une jeune immigrante Yougoslave en recherche d’identité.

Une intrigue savamment enchevêtrée où les couple se font et se défont, des personnages flamboyants – irrésistible Franck Laboidu dans le rôle du percepteur général, et l’extraordinaire Sylvain Lagrange qui endosse pour l’occasion un costume de majorette municipale -  des décors naturels d’une rare authenticité – le film a été entièrement tourné dans un véritable pavillon de Nogent-sur-Marne - et, pour couronner le tout, un dénouement inattendu qui fait qu’on est surpris, mais pas trop, font de cette comédie douce-amère un agréable divertissement.

Malgré quelques maladresses inhérentes à tout premier film – certaines scènes un peu trop statiques, surtout la partie de Monopoly filmée en flash-back flou - « Petits secrets en cachette avec ses amis » est certainement l’un des grands crus de cette année cinématographique.

 Il a d’ailleurs été sélectionné pour être en compétition ce printemps sur la Croisette, et il est fort à parier que le Jury sera favorablement impressionné par cette brochette de jeunes acteurs épatants.

Qui a dit que le Cinéma Français était moribond ? 




LA PAGE DES ASTRES

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AMOUR 
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ZOOLOGIE


LA CALANDRINE DES SABLES




La calandrine des sables est grande comme une othraque et large comme deux éclamisses. Le jour, elle se cache sous le sable, on ne la voit pas.

La nuit, elle rampe sans bruit en bordure des plages.

On dirait qu’elle rêvasse, créature innocente.

Il ne faut pas s’y fier. Sous ses airs contemplatifs, la calandrine est prête à dévorer des proies qui dépassent souvent sa propre taille. J’ai vu un soir une modeste calandrine engloutir un balutrin entier, avec les plumes et tout!

Sa voracité n’a pas de limite. A l’aide de sa double rangée de molaires, elle arrive même à broyer les carapaces des traumes, pourtant si dures. 

Il y a véritablement danger à dormir sur les plages qu’elle fréquente: on connaît tous ces histoires de touristes aux pieds affreusement mutilés pendant leur sommeil...

Sa chair est coriace et filandreuse. Les Tadjs ont une recette secrète pour la préparer et lui faire perdre son amertume, mais les Tadjs mangeraient n’importe quoi -ils ont aussi une recette pour les cappéroles, c’est tout dire.

A la saison des amours, la calandrine change de sexe, ce qui entraîne bien des confusions. Des couples se forment, puis se séparent quelques minutes plus tard, un peu honteux. Leur taux de reproduction déjà extrêmement faible est encore amoindri par le cannibalisme congénital des parents envers leurs rejetons, ce qui fait de la calandrine des sables un animal rarissime.

Une autre espèce plus commune, la calandrine des jardins, tend à supplanter la première au fil du temps. Strictement végétarienne, la calandrine des jardins s’apprivoise facilement, mais retourne à l’état sauvage si vous cessez de la caresser pendant une semaine. Elle s’en va alors avec un air froissée, et vous ne la revoyez plus.

Rien à voir évidemment avec la calandrine musquée, beaucoup plus familière, qui n’hésite pas à élire domicile dans votre frigidaire, d’où elle est très difficile ensuite à déloger. 

Dans l’ensemble, les calandrines sont des animaux nuisibles et opportunistes, mais elles parviennent à nous attendrir à cause de leurs regards potelins. Quand on en a une, il est presque impossible de s’en séparer sans remords.





DEBOUT LES JUNIORS !





INSOLITE

LE CHIEN LE PLUS INTELLIGENT DE CHINE peut ingurgiter jusqu’à dix kilos de croquettes « Obama » par jour et continuer à aboyer normalement. Il s'appelle Dédé. Il fera partie de la prochaine mission spatiale pour Mars et sera chargé de renifler les espions occidentaux pendant leur sommeil ou pendant qu'ils feront la cuisine déguisés en poules mouillées.


LA PLUS MAUVAISE HALEINE DE ST-TROPEZ appartient au beau-fils de la concierge de la Crypte aux vedettes sur le retour. Marc Supertrapèze (c’est son nom) prétend avoir hérité ce don au cours d’une promenade digestive dans le grand collecteur de San Diego (Californie d’Amérique) où un mystérieux cosmonaute au chômage lui aurait transmis un précieux virus lunaire. Toujours est-il que Marc est bien sympathique avec ses dents en cartilage de morse.

LE CELEBRE MAGICIEN BOUDINI parvenait à se libérer de ses liens en les mangeant comme de vulgaires saucisses. Le truc consistait à s’entourer de véritables saucisses, peintes de manière à donner l’illusion d’une corde en saucisse ! Les spectateurs n’y voyaient que du feu, et pourtant c’était de la grande charcuterie.

LE NAIN LE PLUS GRAND DU MONDE mesurait 1m72 et vivait à Irkoutsk, près du lac Baïkal (Russie). Vassili Tourgueniev était originaire d’une famille de nains parfaitement normaux ; ce n’est que vers l’âge de 13 ans que ses parents, alarmés par sa taille excessive, lui ont fait passer des tests médicaux qui ont confirmé sa totale inaptitude au cirque.
Son squelette est conservé au Musée des Impôts Fonciers de Bulgarie.


JAMES BOND aurait vraiment existé. Il occupait un poste de marcheur-en-long dans la ville de Gergovie-sur-mer. Ses facultés pédestres exceptionnelles lui permettaient de faire plus de cent cinquante fois par jour le trajet entre l’épicerie et le burau de tabac, donnant ainsi l’illusion d’un centre-ville surpeuplé et trépidant. Son fils Jim Bond n’a hélas pas hérité de ses dons. Il est aujourd’hui simple ministre du cinéma au sein du conseil municipal.