17 févr. 2010


J’élève un enfant sauvage dans mon jardin.

Beaucoup de parents sont rebutés à l’idée d’élever un enfant sauvage. Pourtant, en prenant quelques précautions élémentaires, rien n’est plus gratifiant que de le voir jouer et gambader dans le parc de votre demeure. Il égayera notablement vos massifs de rhododendrons et sera une source inépuisable d’épuisement pour vos globes oculaires.

Voici quelques conseils pour réussir son acclimatation.

Où le trouver ?

On observe couramment les enfants sauvages en forêt, à condition de ne pas les faire fuir en leur lançant des pierres. L'enfant sauvage est particulièrement abondant dans les massifs montagneux peuplés d'essence de hêtre et de châtaignier. Son métabolisme robuste s'accommode sans peine des climats les plus rudes et on peut le trouver jusqu'à trois mille mètres d'altitude en train de faire de la luge.

On le capture à l’aide de friandises périmées ou de fausses barres de chocolats en plâtre. Parfaitement illettré, l'enfant sauvage ne saurait faire la différence avec le vrai chocolat et ne peut s’assurer de l’exactitude des dates de péremption. Sa capture est donc un jeu d’enfant.

De quoi se nourrit-il ?

On l’a vu, essentiellement de chocolat en tablette ou de biscuits riches en protéines hydrogénées et en huile de palme, mais aussi d’escargots et de petits insectes. Très utile au jardin, c’est l’auxiliaire rêvé pour lutter contre les doryphores et les charançons. Les vieux sujets préfèrent quand même les sucreries, il faut alors impérativement les chasser de la cuisine -sans violence inutile, mais sans céder à leurs caprices non plus.

Les plus jeunes se contentent d’un peu de télévision chaque matin.

La reproduction en captivité

Aux beaux jours, l’enfant sauvage grimpe aux arbres, puis grimpe sur sa moitié si vous avez eu la présence d’esprit d’en acclimater une quelque temps auparavant. Les bébés d’enfants sauvages sont roses et dodus mais ne parviennent que rarement à maturité car les enfants domestiques les confondent avec les baigneurs en plastique, et les noient dans leur bain sans le faire exprès. Il vaut donc mieux que les deux espèces ne cohabitent pas si vous voulez vous lancer dans l’élevage intensif.

Les soins quotidiens

L’enfant sauvage a développé un sérieux retard en matière de comportement vestimentaire, aggravé par une hygiène corporelle aléatoire. Inutile donc de s’embarrasser d’une encombrante garde-robe. Quelques frusques en coutil épais suffiront pour les saisons froides. Dès le printemps, l’enfant sauvage vaque nu comme un ver et sautille de ci de là au gré des fessées que vous lui prodiguez.

Il arrive qu’il tombe malade, mais c’est un simulateur né : Amusez-vous à le démasquer et à triompher de ses rougeoles imaginaires à l’aide d’un clystère de fort diamètre, vous verrez qu’il reprendra bientôt le chemin de l’école buissonnière que vous avez pris soin de fabriquer au fond du jardin.

En cas de fièvre persistante, l’usage du suppositoire au camphre s’avèrera souverain, ainsi que les saignées et les pointes de feu si vous vous sentez l’âme d’un Fagon.

La nuit, l’enfant sauvage dort dans un trou remplit de feuille morte. Pensez à changer régulièrement les feuilles. Achetez-en au besoin chez un Feuillard patenté si vous ne voulez pas les tuer vous-même.

L’enfant sauvage, mythe ou réalité ?

On rapporte que les vieux enfants sauvages, lorsqu’ils sentent la fin venir, se rendent en un lieu secret pour se laisser mourir de rire en se racontant des blagues éculées. C’est le fameux « Cimetière des vieux enfants » de la légendaire contrée de Carambar. La véracité de cette histoire est fortement mise en doute depuis la découverte d’ossements de clown qui tendent à prouver que ces enfants ont été poussés à rire contre leur gré. La polémique fait toujours débat au sein de l’Académie des Scientistes Troupiers.

On dit aussi que les enfants sauvages, au cours de la pleine lune, se transforment en enfants-garou. C’est parfaitement vrai et démontré dans l’ouvrage de Jean-Luc Poisson « Ruralité et cul-terrisme» dans lequel on apprend aussi que pour éloigner ces dangereux Néo lycanthropes, il suffit non pas de clouer-ce qui est cruel- mais de coller à la sécotine une chouette sur la porte de sa maison. Sinon, un suppositoire en argent massif fait aussi l’affaire.

Résumé :

Pour conclure, nous dirons que l'enfant sauvage a été une étape nécessaire à l'avènement de l'enfant actuel, tel que nous le connaissons. Notre devoir est de le protéger afin que nos chères têtes blondes puissent se rendre compte du chemin parcouru depuis l'aube de la maternelle et nous remercier des efforts que nous avons consenti pour qu’ils parviennent à leur tour à devenir de jeunes vieux capables de payer nos retraites. L’enfant sauvage est à l’humanité ce que le cheval est à la vapeur.



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