17 févr. 2010


NOUVELLES PARUTIONS


LES AMANTS D'INGOLSTADT



Roman de Jean Luc Langelot


Le Danube est véritablement le personnage principal de ce roman fleuve que nous livre comme chaque été Jean-Luc Langelot, avec une ponctualité remarquable. Le Danube et ses innombrables boucles qui enserrent tel un anaconda teutonique les fragiles créatures que sont Georg et Graziella.  Fragiles et fiers, timides et fermes, petits et maigres, routiniers et pantouflards, Georg et Graziella s’ennuient et s’amenuisent lentement dans une vie brouillardeuse et lugubre, sans horizon, sans même une sortie à Ikea pour égayer leur dimanche. De ce néant humide monte pourtant une plainte sourde et lancinante, un mugissement animal et profond, celui de l’amour quand même, de l’amour malgré tout. C’est le point de départ d’une longue quête (conquête ?) de l’autre au cours d’une croisière en péniche sur le beau fleuve marron. Une question se pose alors dans toute son acuité : ces naufragés du cœur auront-ils assez de gilets de sauvetage ? Nous ne pouvons vous dévoiler toute la complexité de l’intrigue, mais seulement vous faire apprécier ce superbe passage de la page 845 :

« ...Graziella tourna alors son regard délavé vers Georg. Il était seul à la barre et sa silhouette falote semblait se dissoudre dans la nuit gorgée de silence. Le battement sourd du moteur se mêlait à celui de son coeur et un mot gonfla ses lèvres tel une engelure ravivée par le froid :

Pourquoi ? Pourquoi cette course folle à bord de cette péniche à l’étrave vermoulue ? Pourquoi toute cette eau partout ? Pourquoi cette fumée âcre et noire qui s’échappe de la soute ? Georg tourna à son tour ses yeux pâles vers Graziella et toussa avant de prononcer cette phrase sibylline : « Le rivage est encore loin, mais l’orage est pour bientôt ». Le moteur eut alors un dernier gémissement et l’ampoule électrique s’éteignit tandis que forcissait le courant sous la coque aux planches disjointes. »

 Du grand Langelot, sans doute son roman le plus achevé et le plus personnel dans lequel il semble enfin se dévoiler, lui, l’homme, et ses blessures secrètes qui suintent pour notre plus grande joie au gré de ces pages légères comme les feuilles d’automne.  986 pages. 89,90€, chez Alain Delon Editeur.





 

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